Peter Nesselroth, né dans l’Allemagne nazie d’avant-guerre, était très tôt devenu Américain. Passionné de littérature en même temps que de rigueur linguistique, il fut le premier doctorant de Michael Riffaterre à Columbia, le futur pape new-yorkais du structuralisme. Peter devait appliquer dès le début son immense curiosité littéraire alliée à une impeccable rigueur analytique à la machinerie textuelle de Maldoror. Cela fit de lui une exception à une époque (celle du centenaire des Chants) où dominaient encore les lectures plus ou moins surréalisantes. Il en sortit son essai intitulé Lautréamont’s Imagery: a stylistic approach (Genève: Droz, 1969). C’est pourquoi il fut tout de suite attentif aux efforts de renouvellement des études ducassiennes qui produisirent la première biographie, par François Caradec, puis la création très subversive ses Cahiers Lautréamont, auxquels il collabora à plusieurs reprises. Mais Peter était avant tout un comparatiste à la très vaste culture. Il fut l’un des pionniers du comparatisme renouvelé et l’Université de Toronto, dont il dirigea longtemps le Centre spécialisé, devint grâce à lui l’un des pôles principaux du mouvement de modernisation qui accoucha aussi bien des cultural studies que de la French Theory. Excellent chercheur, Peter était aussi un homme chaleureux, attentif, d’une grande humanité et d’une grande urbanité, un ami dont nous regrettons vivement la disparition.
Michel Pierssens